Tous les jeudis, maman qui vit dans un home, vient passer la journée chez moi . Elle a 90 ans, toute sa tête mais plus l'usage de ses jambes, le matin de tous ses jours c'est une machine, un treuil, un palan qui la lève et qui tous les soirs la couche ... Comme elle a de l'humour, elle blague avec les infirmières qui actionnent sa machine, Victor, je crois bien, qu'elles lui ont donné ce prénom ! Et sa vie passe en attende des repas qui amènent une visite dans sa chambre, le temps se tire en langueur, les contacts sont rares, elle avait un amoureux, comme elle, pensionnaire du home, un jeune de 83 ans qui s'est laissé mourir se sentant inutile, tristesse de la vie ... Mais quand la camionnette spéciale handicapés la dépose chez moi, je vois le bonheur dans son regard, son sourire illumine son visage, elle sait que ce jour est un jour de vie, elle en veut de ces moments encore et encore où elle me raconte son histoire, celle d'avant moi, sa jeunesse, ses parents, ses joies, ses difficultés ... Sa mémoire est intacte, elle chante, elle rit, elle vit ! je me sens devenir la mère de ma mère, et elle la fille de sa fille, nous partageons l'amour, nous nous le disons, elle a besoin de moi et moi j'ai besoin d'elle !
Je t'aime maman !
Etre près de l'autre, ou loin, mais avec l'autre.
Pourquoi faut-il attendre une fin de vie pour qu'il se révèle ainsi?
Merci pour la tendresse qui modèle tes billets.