A peine commencé, le voilà à moitié fini, qui étire ses nuits, les refroidit progressivement, déjà on voit pâlir les arbres avant de rougir de la perte de leurs feuilles, quelques fleurs se hasardent encore au frêle soleil de la mi-journée, les légumes d'hiver sont en surnombre, quelques pommes tiennent à leur branche, pas tout à fait décidée que je suis de les cueillir, voulant prolonger le bonheur de les voir balancer au vent léger d'un été qui se meurt ...
Et je m'amuse au gré de ma fantaisie à couper ci et là ce qui dépasse, ce qui jaunit, ce qui me gêne ... Car je suis de celles qui veulent dominer une croissance excessive, pas question d'imiter Gilles Clément dans son jardin planétaire qui laisse au gré du vent les semences s'implanter au terrain de leur choix pour nous donner un jardin en mouvement ... Son livre est pourtant bien joli, nous dévoilant une nature sauvage qui fait loi, belle au regard, incitant à la promenade en méandre, histoire de ne pas déranger la belle dans son désir d'invasion ...
Non, chez moi, tout est organisé, agencé, les pelouses aux pelouses, régulièrement tondues, le jardin au jardin, aux lignes bien tirées et entretenues, les fleurs aux parterres, d'où je guette pour les extirper toutes fanaisons, les arbres implantés là où ils doivent pour me fournir ombres et lumières ...
Je suis bien au jardin de ma vie, Il me muscle au propre et au figuré, me nourrit le corps et l'esprit, me permet le rêve en toute réalité ... J'aime !